Eider - Extrait narration

This text is an excerpt from the narrative part of the Eider board game. For more information you can read the article dedicated to the game. 

Ce texte est un extrait de la partie narration du jeu de société Eider. Pour plus d'informations vous pouvez consulter l'article dédié au jeu. 

Rohan était parti dans les entrailles du vaisseau pour sa tournée d’inspection. Il s’avait qu’Uma, la planète qu’ils avaient choisi comme destination, n’était plus très loin et il voulait s’assurer que tout était parfaitement fonctionnel. On lui avait promis qu’il s’agissait d’une mission de routine mais il avait assez d’expérience pour savoir que pour un équipage banni du consortium la moindre “mission de routine” pouvait se transformer en véritable aventure. 

         Hanti configurait la répartition des boucliers du vaisseau en vue de l'atterrissage. Tâche d’autant plus délicate que la planète Uma qu’ils allaient aborder n’était pas répertoriée dans la base de données du consortium. Elle avait dû utiliser les maigres informations que le système de communication du vaisseau lui avait donné pour calculer où répartir les boucliers. Cependant, avec 104 atterrissages réussis ce n’était pas l’arrivée sur Uma qu’Hanti redoutait mais ce qu’ils allaient y trouver. 

         Bannu fixait l’écran qui indiquait que la mise en place des missiles était presque terminée. Elle n’avait pas grand-chose à faire d’autre pour le moment. Une fois atterri sur Uma son vrai travail commencerait. Elle devrait alors calibrer le sonar et les viseurs des canons en fonction des paramètres physiques de la planète. Cette tâche était vitale pour le vaisseau car le sonar était les yeux de l’équipage et les canons...son moyen de survie en cas d'agression.

         Owena s’avança vers la baie vitrée et contempla la profondeur infinie de l’espace émaillée d’étoiles lointaines. Malgré la tension qu’elle ressentait, elle devait paraître sûre d’elle et détendue. Ne pas montrer à son équipage ses doutes. Depuis bientôt dix ans ils naviguaient de système solaire en système solaire effectuant des missions tantôt à la limite de la loi tantôt complètement illégale. Jusque-là leur discrétion, les contacts au sein du consortium et la finesse d’Owena leur avait permis de toujours s’en sortir. Cependant deux mois auparavant tout avait changé. Le consortium, dans un étrange excès de zèle, avait décidé de bannir tous les vaisseaux ayant commis des infractions dans le passé. Cette excommunication n’était pas anodine. Désormais l’Eider ne pourrait plus atterrir dans les spatioports du consortium et, plus grave, n’importe qui pourrait s’en prendre à eux sans crainte de représailles. L’équipage ne semblait pas voir les risques que leur nouveau statut impliquait. Owena les connaissait. Mais elle n’était pas du genre à fuir. Au contraire, si plus aucun endroit n’était sans danger pour eux alors autant aller là où ils n’avaient jamais osé aller. Ainsi, elle avait accepté cette mission qui les envoyait sur Uma, planète inconnue du consortium et dont les rares données la qualifiait de sauvage, inhospitalière et dangereuse. 

Juste après leur bannissement Owena avait été contactée par un vieil ami

...Owi comment tu vas ?...Saloperie de consortium, personne ne l’avait vu venir. Plus de 300 vaisseaux bannis d’un seul coup...Si tu veux mon avis c’est pas anodin, faudra rester vigilant...Bon parlons affaires...je sais que t’as jamais voulu sortir totalement du cadre et je respecte ça...mais les choses ont changé, tu n’es plus dans le cadre que tu ne le veuilles ou non. J’ai un contact qui a besoin de gens expérimentés...et discrets alors j’ai forcément pensé à toi...Il travaille pour une secte, des barjos qui croient à la vie éternelle...des cinglés mais des cinglés qui payent bien. Ils ont besoin d’un minerai rare, le NaHk, pour fabriquer leur sceptre de résurrection...complètement allumés je te dis...Je me suis renseigné et il a l’air vraiment rare leur fichu métal. Il semblerait que la planète la plus simple d’accès qui en contient est Uma...elle n’est même pas référencée par le consortium...En plus, tu vas rire, le NaKh est absolument interdit de transport car il est hautement instable…Bref, là on est dans la totale illégalité mais c’est pour cette raison qu’il y a un gros paquet de blé à se faire. Si ça t’intéresse je leur dis que t’es dessus…

L’avenir était incertain, Owena n’avait pas hésité. L’Eider et son équipage auraient bien besoin de cet argent. 

- Atterrissage programmé dans dix minutes ! s’écria Owena depuis son poste de pilotage, Rohan tout va bien en bas ? 

- Ouais, c’est bon. Je range mes outils et je remonte...pas besoin de crier, grommela le mécatronicien, on t’entend tous très bien dans nos transmetteurs.  Owena esquissa un sourire et se concentra sur la vue extérieure ; Uma était apparue devant eux. La grande planète tellurique était magnifique. Depuis l’espace la variété de ses paysages était fascinante. Le bleu des océans parsemés d’archipels, le rouge de montagnes formées par des roches ocres, le vert de forêts luxuriantes et le noir de marais toxiques formaient un patchwork captivant. L’Eider se propulsa vers l’atmosphère d’Uma. La planète et ses extraordinaires paysages se rapprochaient du vaisseau. L’équipage n’avait pas une minute à perdre, plus vite ils auraient récupéré les six échantillons de NaHk dont ils avaient besoin plus vite ils seraient repartis. Le vaisseau se rapprocha du sol et ses moteurs rugirent, leur pleine puissance sollicitée pour ralentir l’Eider qui se posa doucement dans des hautes herbes. Ils étaient arrivés sur Uma au milieu de plaines à l'apparence paisible. A cet instant la mission commençait réellement.   

-C’est bon on a ce qu’il faut, Hanti tu programmes les boucliers pour un décollage

imminent. Bannu reste vigilante, ces maudites arrachées pourraient bien revenir dit Owena à travers son transmetteur. 

- ...Owena...tu devrais regarder dehors...bredouilla Bannu. Non loin de l’Eider trois vaisseaux étaient apparus. Ils se rapprochaient d’eux rapidement et leurs intentions ne laissaient aucun doute. Élancés et munis d’un lourd armement ils étaient taillés pour chasser, les chasser. Owena reconnu immédiatement le symbole rouge qui flanquaient l’aile des vaisseaux, c’était celui du consortium. 

- C’est quoi ce bordel ? Ils font quoi ici ?!... Je pensais que cette planète n’était pas dans leur base de données ! s’exclama la capitaine, pendant un instant elle sembla submergée par ses interrogations mais son instinct de survie repris le dessus et elle s'adressa d’une voix ferme :

-  On est trop lents pour leur échapper et ils ne nous laisseront jamais décoller...on va devoir tous les abattre. A un contre trois nos chances sont maigres. 

- Si on arrive à se planquer un moment je pourrais peut-être utiliser les échantillons de NaHk pour bricoler un armement plus...explosif, suggéra Rohan. 

- T’es complètement fou ! C’est trop dangereux, ce minerai est instable et puis si on le balance on sera venu pour rien ! s’exclama Hanti.

- Du calme Hanti, lui répondit Owena, on n’a pas vraiment le choix, l’idée de Rohan est risquée mais leur foncer dessus l’est encore plus. Tu peux nous localiser une planque Bannu ? 

- Ouais, c’est bon j’ai repéré une grotte plus loin, je pense que si on l’atteint Rohan devrait avoir le temps de faire sa tambouille avant que d’autres chasseurs ne débarquent. 

L’Eider se posa sur le sol de la caverne et le silence les envahi. Le vaisseau et son équipage étaient secoués mais vivants. Personne ne comprenait comment le Consortium était venu jusqu’ici et surtout pourquoi il s’en prenait à eux. Pour la première fois de sa vie Owena avait peur. D’abord le Consortium les banissait et maintenant il les attaquait sur une planète au fin fond de la galaxie. Elle expira brusquement, sortant de l’apnée qui la prenait chaque fois qu’elle était stressée. Elle était tentée de faire décoller l’Eider et de fuir cette planète. Mais une fois dans l’espace ils seraient vulnérables et son petit vaisseau ne pourrait jamais tenir face à la puissance du Consortium. Owena était plongée dans ses pensées quand elle vit sur l’écran du sonar un petit point vert qui s’approchait doucement vers le centre. Elle leva les yeux vers la baie vitrée donnant sur les profondeurs sombres de la grotte.

Au loin se tenait un homme. Sa silhouette décharnée s’avançait vers eux d’un pas calme. Il ne semblait pas armé et s’aidait d’un bâton pour marcher.